Eric Doussin |
Pour Sandrine,
La rumeur court, confuse encore, qu’un enfant a dévoré
le cœur de sa mère après l’avoir tuée de vingt-neuf coups de couteau.
La rumeur court, confuse encore, que dans les eaux
boueuses du fleuve on a retrouvé emballés dans des sacs de plastique noir les
morceaux du corps d’un homme.
La rumeur court, confuse encore, que les fumées
rejetées par l’usine d’incinération provoquent des irritations de l’épiderme et
à plus ou moins long terme toutes
sortes de maladies aux noms compliqués.
La rumeur court, confuse encore, qu’ailleurs, mais on ne sait où, sont perpétrés
d’impensables massacres.
La rumeur court, confuse encore, que tu poussais de
tels cris lorsque tu étais avec ton amant que…
La rumeur court, enflée du souffle de mille poitrines,
passant de bouche en bouche, de seuil en seuil, volant par-dessus les toits,
sautant de gauche, de droite, rasant les murs, rebondissant, la rumeur court…
C’était la
nuit où la foudre est tombée sur ta maison, la nuit où j’ai secoué les cendres de nos
amours anciennes.
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Ce texte inspiré par une œuvre de l’artiste Sandrine
Raoult baptisée « La rumeur » appartient au recueil autoédité Les
heures captives (décembre 2012). Les « impensables massacres » dont
il est question sont à l’origine précisément ceux du Rwanda. Frédéric Perrot
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