« L’idée la plus naturelle à l’homme,
celle qui lui vient naïvement, comme du fond de sa nature, est l’idée de son
innocence. » (Albert Camus, La Chute)
Sur une plage oublieuse, l’enseveli vivant
proteste encore, non pour la forme, mais d’une voix claire, pour évoquer homme
jusqu’au bout, son innocence… Il y a dû y avoir une erreur ; car ce n’est pas
par jeu qu’il est enterré ainsi, il n’a pas été la victime amusée et consentante
d’une bande d’enfants, il n’y a jamais eu d’enfants ici, ni de châteaux
fragiles assiégés par les vagues, la plage est déserte et il est enterré
réellement : sa tête seule dépasse du sable blanc qui tout autour de lui
semble s’étendre à perte de vue.
Sur son visage qu’il aimerait tendre
obstinément vers le ciel et la nuit vers les étoiles, il sent le vent venu du
large, ses violentes rafales, qui le harcèlent et le soumettent. Le sable en
tourbillonnant lui meurtrit les yeux et la rumeur des vagues qui s’abattent sur
le rivage, le chant infini et monotone de la mer, ne le consolent pas de
devenir lentement aveugle… Quand le vent tombe, il crie ou pleure mais en ce
désert nul ne l’entend, homme jusqu’au bout, protester de son innocence.
(Août
2014)