Eric Doussin |
Ce sont ici les
premières lignes du récit d’Henry James, Le tour d’écrou (1898)
Autour du feu,
l’histoire nous avait tenus passablement haletants, mais je ne me souviens
d’aucun commentaire à son propos – sinon cette évidence qu’elle était aussi
sinistre qu’il sied à une histoire contée dans une vieille maison, le soir de
Noël – jusqu’à ce que quelqu’un risquât la remarque que c’était le seul cas, à
sa connaissance, d’une apparition surnaturelle advenant à un enfant. Il me faut
préciser qu’il s’agissait, en l’occurrence, d’une apparition dans une vieille
maison semblable à celle où nous étions réunis en la circonstance – une
terrifiante apparition à un petit garçon qui, terrifié, réveillait sa mère dont
il partageait la chambre, et qui la réveillait moins pour dissiper sa terreur
et se rendormir calmé, que pour qu’elle-même
se trouve confrontée à la vision qui l’avait bouleversé. Ce fut cette remarque
qui nous valut de Douglas, pas immédiatement mais plus tard dans la soirée, une
réplique qui eut l’intéressante conséquence qu’on va voir. Quelqu’un d’autre
raconta une histoire qui ne fit pas grand effet, et dont je notais que Douglas
ne l’écoutait pas. J’y vis le signe qu’il avait lui-même quelque chose à
raconter et que nous n’avions qu’à attendre. De fait, nous attendîmes deux
soirées : mais ce même soir, avant que nous nous séparions, il révéla ce
qu’il avait en tête.
« Pour ce qui
est du fantôme de Griffin, et quelque crédit qu’on lui prête, je conviens que
le fait d’apparaître d’abord à un jeune garçon d’un âge si tendre ajoute à ce
récit une tonalité singulière. Mais, à ma connaissance, ce n’est pas le premier cas de cet ordre concernant un
enfant. Et si l’enfant ajoute à l’effet du récit un tour d’écrou, qu’en
serait-il, à votre avis, de deux enfants ?
(Traduit de
l’américain par Monique Nemer, La bibliothèque cosmopolite, Editions Stock,
1994)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire