Ce n’est pas le
moindre talent de Woody Allen, que d’être un amateur avisé de musique. La
musique de ses films est toujours excellente, comme en témoigne un double CD (Woody Allen, La musique, de Manhattan à
Magic in the Moonlight)
Si un bon
écrivain se reconnaît à ce qu’il a une oreille, comme disait, je crois,
Hemingway, cela est vrai également, de façon plus surprenante, des cinéastes.
Bonne oreille,
bon cinéaste ! L’exemple le plus remarquable est Stanley Kubrick, dont les
films peuvent être appréhendés comme de vastes et grandioses symphonies.
Une preuve par
l’absurde de cette modeste thèse serait donnée par le très surestimé Xavier
Dolan, dont les personnages aiment à hurler
des chansons de Céline Dion.
À ce propos,
dans l’un des plus éprouvants navets de
toute l’histoire du cinéma – Titanic
de James Cameron – les pauvres Leonardo DiCaprio et Kate Winslet vivent leur
idylle de carton-pâte alors que s’égosille la même Céline Dion. Il n’y a peut-être
pas de hasard… Mauvaise musique, mauvais cinéaste !
Pour en revenir
à des artistes plus talentueux, tandis que Kubrick aimait la musique classique et
la musique contemporaine la plus pointue, avec une prédilection pour Ligeti (Shining, Eyes Wide Shut), Woody Allen est avant tout un amateur de jazz, de
ce vieux jazz des années trente ou quarante ; et cela participe au charme un
peu décalé et sans doute nostalgique
de nombre de ses films...
Une antipathie
musicale est aussi à l’origine d’une de ses répliques les plus fameuses. Dans Meurtre mystérieux à Manhattan, le
personnage interprété par Allen a accepté d’assister à un opéra de Wagner ;
sa femme interprétée par Diane Keaton, ayant accepté de s’ennuyer à un match de
hockey sur glace.
Rapide ellipse
et l’on voit Allen sortir furibard d’une salle d’opéra, tout en expliquant :
« Quand j’entends du Wagner, j’ai
envie d’envahir la Pologne… »
Irrésistiblement
cette scène me fait penser à L’homme sans
qualités, le roman de Robert Musil. Ulrich, le personnage principal, a un
ami, Walter, marié à Clarisse. Il arrive souvent au pauvre Walter de jouer sans
pouvoir s’en empêcher, du Wagner au piano.
Hélas, c’est un
motif de discorde absolu et de trouble sexuel dans le couple. Ulrich ne l’ignore
pas : à chaque fois que Walter malgré lui en joue, Clarisse qui méprise « les relents de bière » de la
musique de Wagner, se refuse à son mari « pendant des semaines » !
Pour en revenir
à Woody Allen, une dernière fois. Selon la légende, le soir où son film Annie Hall (1977) était récompensé de
quatre oscars, Allen était à New York, dans un club de jazz, où il jouait de la
clarinette avec des amis.
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