jeudi 1 juillet 2021

L'entame (ou la timidité)

 

                                                                                       pour Hélène

 

      

J’attendrai patiemment la fin d’un règne. Me convient tout à fait cette atmosphère cauteleuse, qui n’ose dire son nom et où ce sera à qui dira le premier, que veux-tu toi ? On sait la tristesse d’un désir trop vite exprimé, et qui soudain, se révèle hors de propos ou marqué du sceau de la déception, ce n’était donc que cela

Mieux vaut se taire et ne faire d’autre geste que celui de porter son verre à ses lèvres, en se répétant, j’attendrai patiemment la fin d’un règne, en muselant l’animal, déjà excédé par des contacts de hasard, quelques courtes promesses, qui n’en sont peut-être pas et que l’on aurait mal interprétées…

 

J’attendrai patiemment la fin d’un règne. Me convient tout à fait cette atmosphère cauteleuse, qui n’ose dire son nom et où ce sera à qui dira le premier, que veux-tu toi ? Et puis, toute plaisanterie mise à part, il ne s’agirait pas entre nous, de nous jeter l’un sur l’autre, comme des fauves affamés… On sait la catastrophe d’un mouvement trop brusque, et qui entraîne aussi une trop vive réaction, par réflexe

Mieux vaut éviter les plates excuses et ne faire d’autre geste que celui de porter son verre à ses lèvres, en se répétant malgré l’ivresse, j’attendrai patiemment la fin d’un règne, en muselant l’animal, pourtant toujours plus excédé par une goutte de sang, un baiser volé, une légère morsure…

 

Il serait si simple de se dire, qui joue la première carte, pour une entame à pique, à cœur ou à carreau

 

Mais j’attendrai patiemment la fin d’un règne. Me convient tout à fait cette atmosphère cauteleuse, qui n’ose dire son nom et où ce sera à qui dira le premier, que veux-tu toi ?

Oui, j’attendrai patiemment la fin d’un règne. Dussé-je au terme de ce jeu de dupes, rentrer bredouille, comme d’habitude, avec dans la bouche, outre l’alcool, rien que le goût d’un peu de sang, en guise de festin…

 

 

Le texte a été écrit en 2010, sur une suggestion d’Hélène. Frédéric Perrot.

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