Eric Doussin |
Dans
les profondeurs évoluent des créatures étranges
Leurs
formes sont souvent épouvantables
Comme
les projections d’un cerveau paranoïaque
Parfois
ce sont des chimères
Parfois
elles semblent inachevées
Leurs
noms sont en soi un poème enchâssé
L’affreux
requin-lézard
Le
revenant dont le crâne est transparent
Le
grand avaleur
Le
grenadier
Le
dragon à écailles
Le
grandgousier
Le
poisson-ogre
Prédateur
robuste et puissant
Mais
qui aime les listes et les tentatives d’épuisement ?
À
l’avenir vous éviterez de naviguer
Entre
fausse érudition et vain encyclopédisme
Vos
sources sont de seconde main
Nous
ne sommes plus requis par l’écume virtuelle
Nous
connaissons parfaitement vos phobies
Elles
ont pour noms immersion noyade
Avez-vous
consulté en ce qui concerne votre sur-moi ?
Connaissez-vous
le sentiment océanique ?
C’est
de l’histoire ancienne
C’est
l’autre Tartarin de la musique
Qui
l’a décrit dans une lettre
Au
charlatan de Vienne
Dans
les profondeurs
Évoluent
des créatures étranges
Preuves
manifestes de ce que peut avoir d’aberrant
La
vie dans sa dimension biologique
Le
mystère est qu’elles ne connaissent
Ni
n’aient besoin de la lumière
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« Tartarin de la musique »
est l’expression employée par Witold Gombrowicz dans son Journal pour
désigner Romain Rolland. Dans des pages célèbres, reprises par Milan Kundera dans
L’immortalité, Gombrowicz défend contre Nietzsche et Romain Rolland la
musique de Beethoven.
« charlatan de Vienne » est
une expression commune pour désigner Freud. Je la connais par Vladimir Nabokov,
qui l’emploie dans Lolita.
Qui voudrait savoir ce que Romain Rolland
nomme « le sentiment océanique » n’aura qu’à se renseigner !
Le texte appartient au recueil inédit La
solitude imaginaire (octobre 2016). Frédéric Perrot.
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