vendredi 22 août 2025

La pantalonnade démocratique

 


Le texte qui est aussi dans mon esprit un hommage à Herman Melville, a été écrit à partir de fragments découpés par l’ami Éric Doussin dans un livre. Frédéric Perrot

lundi 4 août 2025

Tout un cinéma (pour Matthieu)

 


Le désir s’étiole tout au long du couloir. C’est un long et interminable couloir qui s’étrécit, comme dans les films. Des deux côtés les portes se succèdent en dépit de toute logique. La chambre 241 est l’immédiate voisine de la 53. Peut-être cela a-t-il un sens mathématique secret, mais deux étages au moins devraient les séparer, il me semble. Comme je n’envisage rien d’autre, je toque légèrement à la porte pour ne pas avoir l’impression d’avoir vécu en vain l’heure et demi précédente. Nul besoin de roulements de tambour ou de musique inquiétante. La porte de la chambre 241 s’ouvre sans aucun suspens au bout de quelques secondes. Une pauvre femme à moitié endormie me précise ses tarifs et qu’il ne faut pas faire trop de bruit, parce qu’il y a un enfant qui dort dans la pièce d’à côté. Je me croyais dans un film d’horreur, un récit fantastique, et me voilà balancé dans un truc social, du cinéma belge, et j’ai quand même le sentiment d’y perdre un peu. Je ne vais pas m’attarder, je ne vais pas me comporter comme un personnage de Dostoïevski, un homme du souterrain, je ne vais pas pour le plaisir humilier cette femme et lui faire prendre conscience de son malheur et de son indignité, en étant juste un pauvre type… Je tousse à deux ou trois reprises de façon excessive comme si j’étais gêné : je suis déjà à la porte. J’aimerais seulement avoir une parole humaine pour cette femme avant de déguerpir au plus vite. – Mais je ne trouve rien.

 

 

                                                                     Frédéric Perrot

dimanche 27 juillet 2025

Chiffe molle

Hambourg

Chiffe molle

Soudain l’angoisse me saisit et fait de moi une chiffe molle. Je ne vois jamais rien venir, à chaque fois je suis pris au dépourvu : d’un moment à l’autre, je crève brusquement de peur et je succombe à une horrible faiblesse, je trébuche, je vacille, comme si j’avais reçu un coup véritable et je tombe pantelant en travers de mon canapé. L’angoisse est une boxeuse qui vous envoie au tapis en moins d’un round. – Ce n’est pas si mal pour une première punchline. Bravo. 12/20 et trois pouces en l’air ! Vous devriez vous y mettre plus activement, poursuivre dans cette veine, écrire des tweets, publier vos humeurs en temps réel, rentrer dans le jeu, agir enfin, cela vous changerait…

Histoire cousue de fil blanc

Au terme d’une suite de rêves crasseux, je me suis retrouvé dès le matin précipité dans une histoire cousue de fil blanc. Un message m’attendait sur mon téléphone. Un message adressé par une femme : je n’en croyais pas mes yeux. C’était une heure approximative de rendez-vous dans l’après-midi au centre-ville. Il ne s’agissait pour moi que de répondre afin que cela se produise ! Et quelque chose dont aussitôt je me fis un champ immense de rêveries toutes plus favorables pour moi, se passerait dans ma vie. Mon téléphone dysfonctionna une bonne partie de la matinée. Impossible d’envoyer un message. Pour je ne sais quelle raison sans doute stupide. Cela bien sûr m’agaçait prodigieusement. J’avais mal dormi et ce contretemps d’ordre technologique me rendait furieux, au fur et à mesure que les heures et les minutes passaient. Enfin vers midi trente, je pus envoyer un message, qui fut reçu et accompagné d’une réponse encourageante. Tout semblait bien se passer. Notez bien que l’emploi du passé simple, c’est pour montrer toute l’absurdité de cette histoire. Bref. Je me suis rendu à l’heure dite au lieu du rendez-vous, nous nous sommes retrouvés avec plaisir, nous sommes allés nous installer à une terrasse de café, désireux de faire connaissance et de nous séduire et de nous charmer l’un l’autre… Mais la longue suite et la rapide fin furent consternantes.

 

                                                                                   Frédéric Perrot