dimanche 22 janvier 2017

sur Lover Lover Lover (de Leonard Cohen)

Le charme de la ritournelle

Sur Lover Lover Lover de Leonard Cohen

Si le sens général de la chanson reste pour moi assez mystérieux, j’aime l’idée du dialogue entre un fils et son père. C’est un récit, une fiction. Le fils est peut-être un soldat. Il veut changer de « nom », il interpelle son père à ce sujet, car celui qu’il « porte » est « recouvert » de « peur », de « saleté », de « lâcheté » et de « honte ». Le fils voudrait renaître, si je puis dire, dans un autre corps et avec une autre personnalité, un « visage » « juste » « cette fois » et « un esprit » « calme ». Le père qui l’a « verrouillé » dans « ce corps », lui suggère qu’il peut au choix « l’utiliser comme une arme » « ou pour faire sourire quelques femmes ». On notera en passant l’irone discrète de ce conseil paternel si libéral ! Le père semble à la fin se justifier (« Je ne me suis jamais détourné » « Je ne suis jamais parti ») et laisse entendre à son fils qu’il est libre et qu’il n’a plus besoin de lui depuis longtemps. C’est lui le fils qui a « construit le temple » et qui a « recouvert » le « visage » du père. À ce moment, la chanson peut faire songer à Story of Isaac, sur le second album de Cohen, où le mythe d’Abraham est raconté du point de vue du fils, celui que l’on s’apprête à sacrifier au sommet d’une colline… Dans le contexte historique précis où elle est écrite – la guerre du Sinaï, « pour les égyptiens et les israélites » – la dernière strophe reste ouverte et peut sembler un appel ambigu à la paix : « Puisse l’esprit de cette chanson » « s’élever » « pur et libre ». « Puisse-t-il être pour toi » « un bouclier contre l’ennemi ». Je ne dirai rien du refrain, si simple, si beau, si mémorable, qui me paraît établir le contraste avec la noirceur des couplets et participe au charme toujours renouvelé de la chanson, de la ritournelle !


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