vendredi 9 août 2024

Philip K. Dick, La Transmigration de Timothy Archer (note de Journal)


 

La Transmigration de Timothy Archer. Philip K. Dick. C’est le troisième tome de La Trilogie divine, initiée par SIVA (1). Le roman commence dans les heures qui suivent l’assassinat de John Lennon et c’est une sorte de chef-d’œuvre automatique. Comme Substance Mort, qui empruntait encore légèrement à la science-fiction (2). Le roman se révèle profond dans ses interrogations et malicieux dans le choix de son narrateur, sa narratrice, Angel Archer, qui seule parmi tous les cinglés qui l’entourent, est la voix du doute, du scepticisme, de l’incrédulité et n’en démordra pas. Après tout, c’est elle qui raconte l’histoire ! Contrairement à la plupart des romans de K. Dick, il n’y a aucune alternance de point de vue. Cette narratrice unique est aussi le personnage le plus humain, le plus faillible. Son mari s’est suicidé. Elle est la belle-fille de l’évêque, Timothy Archer, qui lui-même traverse une profonde crise spirituelle : il ne croit plus au Christ ! En effet, certaines découvertes archéologiques faites en Terre Sainte remettent en cause toutes ses croyances. On n’est jamais loin de Dostoïevski, et de ses personnages qui aiment à débattre de questions métaphysiques, mais dans l’Amérique de la contre-culture finissante et avec une part de dérision beaucoup plus grande ! Les personnages de K. Dick restent des dingues et des paumés, pourrait-on dire, en songeant à une chanson célèbre. Ce Timothy Archer est surtout un être livresque, sans pensée personnelle et il semble certain que l’auteur se sent plus proche de sa contradictrice, cette Angel Archer, qui cherche à oublier son deuil et sa tristesse en fumant des joints et voudrait seulement mener une existence paisible… Comme c’est le dernier roman de Philip K. Dick, terminé et corrigé juste avant son décès en mars 1982, on peut parler d’un véritable couronnement, une non-conclusion ironique et mélancolique apportée à son œuvre. 


Norman Spinrad, sur La Transmigration de Timothy Archer : 

« … le dernier testament de Philip K. Dick, ce n’est ni SIVA, ni L’Invasion divine, ni L’Exégèse de Philip K. Dick, ni le recueil d’interviews de Rickman. Le dernier testament de Philip K. Dick, c’est La Transmigration de Timothy Archer, son tout dernier roman. Une œuvre d’une lucidité lumineuse, tout imprégnée de bon sens, qui représente une percée considérable dans la carrière littéraire déjà bien avancée de Phil. (...) Le fait que La Transmigration de Timothy Archer soit le dernier roman de Philip K. Dick est à la fois une tragédie et un triomphe. (...) Un triomphe parce qu’il constitue un testament parfait, à la fois pour l’écrivain et pour l’homme. Avec ce roman, on retrouve un Dick en possession de tous ses moyens littéraires, au terme d’une carrière prématurément interrompue ; on y retrouve aussi une véritable méditation métaphysique, la véritable compréhension humaine déjà présente dans UbikLe Maître du Haut ChâteauLe Dieu venu du Centaure et Glissement de temps sur Mars après une longue période jalonnée d’œuvres secondaires. » (Norman Spinrad, « La Transmutation de Philip K. Dick », in Regards sur Philip K. Dick – Le Kaledickoscope, ouvrage collectif dirigé par Hélène Collon, Encrage, 1992)



Philip K. Dick, La Trilogie divine

Traduit de l’anglais par Robert Louit et Alain Domérieux

Traductions harmonisées par Gilles Goullet


1. Pour lire un extrait de SIVA :

https://beldemai.blogspot.com/2021/11/siva-un-extrait-du-roman-de-philip-k.html

2. Sur Substance Mort :

 https://beldemai.blogspot.com/2022/07/philip-k-dick-substance-mort_91.html

 

                                                                                 Frédéric Perrot (avril – août 2024)

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