mardi 13 juin 2017

l'inutile ressassement

L’inutile ressassement


Pour créer quoi que ce soit, l’esprit doit croire à ses propres chimères. Entre tout ce qui te manque, te manque aussi cette force.

            L’inutile ressassement – « Je ne rends pas les coups, mais je ne pardonne pas, si je me sens offensé. La célèbre prière que le Christ lui-même aurait enseignée à ses premiers disciples est d’un idéalisme bien luxueux ; elle me semble manquer de tout sens psychologique et méconnaître l’homme de la rue, l’homme réel, qui parfois tient à son offense, la ressasse, la nourrit, car elle est ce qui le fait vivre.»

Le désir de se venger – « Je sais que le désir de se venger est en soi absurde. Mais combien d’heures ai-je passées à échafauder des plans, tout en sachant que je ne les mettrai pas en œuvre… »

Ou : « Il s’est peut-être vengé ; peut-être un instant a-t-il, étanché sa soif… Mais il n’en est même pas sûr et n’en tire aucun profit. Plus une vengeance est différée, plus elle devient irréelle… »

Il y a peut-être des « actes manqués » ; il y a surtout des actes inutiles, accomplis tout à fait consciemment. « Imaginer ou agir » – Rester autant que se peut dans la première moitié de l’alternative…

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            « N’écris pas pour te venger ». Et si malgré tout tu cèdes à cette triste impulsion, que ta vengeance demeure abstraite.

            Les absurdes vengeances familiales  – « On devrait se garder d’écrire pour régler des comptes et considérer par exemple que nos parents seront les premières personnes à ne pas nous lire…»

            Ne médisons pas de nos pères – « Qui sait s’ils nous ont voulus ? Ce sera tout sur ce sujet, trop facilement glissant…»
           
Ou : « Nous ne pensons pas, comme l’écrivait imprudemment un auteur à la mode, que nous serons vrais en étant abjects… »

Un être sans profondeurs – « Non qu’il en fût dépourvu, mais parce qu’il refusait de leur accorder l’importance excessive qu’une certaine modernité leur a prêtée ! »

            Ou : « À quoi cela nous servirait-il d’être profonds ? »

Une grande vulgarité – « Il y a une grande vulgarité à tout vouloir dire ou même à croire que tout peut être dit. Je ne suis que mépris pour les tenants de la parole spontanée, prétendument libre, ennemis déclarés du silence. Il faut savoir se taire pour avoir peut-être parfois quelque chose à dire. Il faut savoir se taire aussi car la parole inconsidérée peut être pour l’autre une blessure

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Dans une lecture récente :

« Il y a des gens dont la religion consiste à toujours pardonner les offenses,  mais qui ne les oublient jamais. Pour moi je ne suis pas d’assez bonne étoffe pour pardonner à l’offense, mais je l'oublie toujours.» (Albert Camus, Cahier VII, octobre 1953)


                                                    Frédéric Perrot

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