lundi 19 février 2018

lancer du poids (à la manière de)

Lancer du poids

« Au fond, je suis un sportif, le sportif au lit. Comprenez-moi bien, à peine ai-je les yeux fermés que me voilà en action.» (Henri Michaux, « Le sportif au lit », La nuit remue)

                                                          
         Je suis toujours étonné de ma capacité à m’ennuyer, en tout lieu, toute circonstance, quelle que soit la compagnie. L’ennui m’est un réflexe naturel, je crois, et je m’y abandonne comme à une vague irrésistible où je sombre en bâillant… Ceci du moins dans mes plus mauvais jours, dans les meilleurs je me soulage plutôt ainsi : je vous soulève, au hasard, un pédant, le premier pédant qui me tombe sous la main, et en tournant sur moi-même dans le cercle imparti, et avec un mouvement du corps dont la souplesse étonne, je vous l’envoie voler au loin, mais au loin !
            Je ne saurais dire combien mon exploit accompli, je respire plus librement. Mais tout le monde vous le dira : pour un homme de peu comme moi, rien de tel que le sport. À cet égard, je ne cesse de déplorer que le lancer de pédant ne soit pas encore devenu une discipline olympique, non que j’aie particulièrement le goût des médailles, mais briller aux dépens d’un pédant vous revigore un homme. À noter que je ne dis pédant que pour la sonorité et par inclination naturelle : maîtres, dieux, chefs, gourous, poètes sont autant de poids honorables ! Il est salubre sans doute de se débarrasser de ce qui pèse.



Le texte a été écrit en 1999. Il est un hommage à Henri Michaux, que je lisais beaucoup à l'époque.



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