dimanche 20 novembre 2022

Quand je dis que je n'y arrive pas

 


« Je présume qu’il est arrivé à la plupart d’entre vous de se trouver saisi au revers de la veste par un de ces bavards qui, avides de faire entendre le son de leur voix, recherchent un compagnon dont la seule fonction consistera à prêter l’oreille sans être pourtant contraint d’ouvrir la bouche… »

                                                           Louis-René des Forêts, Le bavard

 

 

Quand je dis que je n’y arrive pas,

ce me semble clair :

je n’y arrive pas tout bonnement,

je ne parviens pas à éprouver les sentiments

que l’on pourrait attendre de moi

en certaines circonstances

et dont on dit pourtant qu’ils sont

naturels et spontanés…

 

Eh bien, suis-je hors de la nature

si je ne les éprouve pas,

cela fait-il de moi un monstre

si je ne les trouve nulle part en moi, 

et si la conscience que j’en ai

ne change rien à l’affaire ?

Quand je dis que je n’y arrive pas

ce me semble clair…

 

Pardonnez-moi, je m’emporte

et je vous postillonne au visage :

prenez donc ce mouchoir, il est propre.

Je ne voulais pas vous importuner… 

Sachez que je ne compte pas monologuer

ni m’étendre sur quelque chose

qui ne fait en aucun cas de moi

un être bizarre ou singulier…

Je conçois même le contraire :

mon absence d’empathie est des plus banales,  

et chaque jour je puis constater

plus de comportements vils

que de comportements nobles…

Nous avons sans cesse en bouche

les mots générosité tolérance respect,

nous aimons à penser

que nous sommes animés

par le souci de l’autre,

mais concrètement

cela se traduit-il dans nos actes ?

Qui ne se détourne pas

quand il voit un malheureux approcher ?

Qui supporte avec patience

les plaintes d’un ami ?

 

Non, non, ne partez pas encore :

mon verre est vide et j’ai presque fini…

Comprenez-moi bien, je ne mets pas

tout le monde dans le même sac,

il y a toujours des exceptions,

des personnes qui agissent

avec ce souci dont je parlais

juste avant, et j’ajouterai même

que sans ces exceptions,

sans ces exceptions…

Excusez-moi, j’ai perdu le fil :

je ne sais plus où je voulais en venir,

et je vois bien que mon bavardage vous ennuie…

Sachez alors, un mot seulement,

que moi je ne suis pas une exception…

Je ne suis au fond ni meilleur ni pire,

et quand je dis que je n’y arrive pas,

ce me semble clair…

 

 

                                                                  Frédéric Perrot

5 commentaires:

  1. Réponses
    1. Merci Alain. Super ta photo sur Insta, tu as le sourire !

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    2. Merci! Il faut en profiter quand on l'a oui, car ça peut repartir très vite malheureusement.

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  2. Ça sent le vécu ;-)
    Bien vu en tout cas.
    Nous sommes tous gris plus ou moins foncés. On a des modèles de sainteté mais ils sont inaccessibles toutefois parfois j y pense quand je me laisse aller à l indifférence au mépris ou à la haine.
    Psychologiquement un authentique salopard ne peut pas avoir de l estimé pour lui c est pas confortable comme attitude.

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    1. Merci pour ton commentaire Gilles ! Bon, comme je ne suis qu'un mécréant, je n'ai pas vraiment de modèles de sainteté ! Mais en effet l'indifférence, le mépris ou la haine sont ce dont on doit se garder à tout prix... A bientôt !

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